La Vie en Chansons [Part. 2]

A la frontière du monde ouvrier et rural…

par Cécile Lensen

Extrait de l’exposition « La vie en chansons« 

 

En France et dans les zones rurales belges, pendant très longtemps, le travail ouvrier est vu comme une modalité du travail agricole, ainsi les paysans travaillent aux usines lorsqu’ils ne peuvent pas s’occuper des travaux des champs. Cela signifie que les pratiques musicales et festives ouvrières restent essentiellement rurales.

On retrouve des banquets d’associations avec leurs chansons de circonstances, leurs hymnes en rapport direct avec le commerce, l’artisanat, ou encore les loisirs. Peu à peu, avec l’évolution de la culture ouvrière et le déploiement de quartiers ouvriers, des hymnes syndicaux et politiques font également leur apparition, ceux-ci sont précisément des vecteurs d’identités communes.
C’est sur ce terrain également que vont se développer les harmonies et les fanfares, très prolifiques dans les zones minières. L’apprentissage ne se fait plus d’un maître à un élève, mais dans la fanfare où les jeunes se retrouvent après le travail – comme ils iront plus tard au club de football. Les harmonies ont alors un rôle pédagogique « d’alphabétisation musicale ». C’est par la musique que les ouvriers apprennent parfois à lire et à écrire.

Un Orphéon

Un orphéon…


Ces fanfares, harmonies et orphéons vont dès lors participer à toutes les manifestations importantes de la vie de l’endroit. Certains se spécialisent en orchestre de danse. On y joue toutes sortes de musiques, des marches bien sûr, des processions, des ouvertures d’opéra, des fantaisies, des galops, ainsi que toutes les formes de musiques à danser : polkas, valses, quadrilles, mazurkas, scottishs,… Et des airs populaires à la mode.
Les écoles donnent également des cours de musique et de nombreux établissements possèdent un orchestre. On y apprend des hymnes patriotiques et militaires. Le chant est un moyen simple et peu coûteux d’endoctrinement des masses, on y développe l’honneur et l’identité de la patrie et de son Roi. 
En France, de nombreux poèmes et chansons vont être appris à l’école, dès la défaite de 1871 afin de glorifier les vaillants défenseurs de la patrie, pleurer la perte de l’Alsace et la Lorraine et réclamer la revanche à cette Allemagne « en dessous de tout ».

 

Image

La musique dans les Centres Urbains

La musique déracinée des centres urbains

Le Bal Populaire

Les bals populaires.


  Il y a tout d’abord les petites communautés de déracinés ruraux qui se regroupent bien souvent dans les mêmes quartiers et qui importent ainsi leurs patois, leurs cultures et leurs musiques.
Dans les arrière-salles des cafés vont être organisés des bals, autour d’un patron musicien ou d’un professionnel appointé. Les musiques de danses des 78 tours vont également prendre leur essor dans ce contexte d’arrière-bistrot ou dans les bals populaires de type musette.
Ces déracinés, partis à la ville pour trouver une vie meilleure, deviennent souvent des domestiques. Cela n’est pas sans conséquence sur la vie musicale. Ces personnes s’intégrant dans le monde de la haute société, y découvrent le répertoire de « Monsieur, Madame »… Un répertoire à la mode qu’ils ramèneront ensuite au village où il sera considéré comme plus distingué et valorisant, signe d’ascension sociale.
Dans le contexte de la ville, les fêtes de l’année agricole vont s’estomper au profit de l’année civile (21 juillet) et religieuse. Et si les célébrations de rites de passage persistent, une nouvelle façon de faire la fête va se développer… sans avoir aucun événement particulier à célébrer… Les « sorties ».
Les bals populaires existent depuis 1830 en région parisienne. Le fait de sortir le dimanche ou n’importe quand dans la semaine, va considérablement changer les pratiques musicales. De ménestriers itinérants allant de fêtes de mariages en bals, les ménestriers vont se sédentariser, obtenant dès lors un appointements. Le métier de musicien à danser et de chanteur change alors radicalement.
 

Image

Image